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N° 017 - Je lis pour ne plus avoir à le faire

Comme la mante religieuse bouffe le mâle après la fornication, je lis pour ne plus avoir à me taire. Pour ne plus avoir à revisiter les sombres coins et recoins de chaque chapitre, chaque section, je lis sur ta table mais non tes matières. Je lis pour tuer, pour torturer. Je prends mon pied dans le livre qui souffre le martyr, quand il fait mal et que ses points se fusionnent avec des virgules pour donner du suspens, alors là je lis pour faire chier. Je lis pour redonner à la page sa virginité. Pour recoudre un hymen hyperbolisé, perdu entre l'épilogue ou le prologue et le prologue du monologue, dans une histoire de cul baisée par des éditeurs catholiques qui, eux, lisent pour prouver que Satan existe. Et je lis parce que Satan existe, parce que Dieu l'exige et que tu existes. Je lis pour moi, mon égo et mon exil, d'ailleurs lui seul me connait.

À vrai dire, lui seul me reconnait ; comme tout claustrophobe reconnait un placard et tout menteur la vérité. Permettez donc que je lise pour ne pas me retrouver, comme l’ivrogne au bout d'un couloir ne saurait retrouver l'autre bout, ou même sa voix pourtant célèbre. Je ne lis pas pour être célèbre. Je l'ai déjà été dans un passé lointain, dans un rêve en couleur sous un ciel raciste, dans une planète raciste, et une galaxie raciste. Donc moi je lis pour un Klux Klux Klan lynché, une mère abandonnée, et le paradis oublié. J'ai lu pour l'amour pour pouvoir me branler devant sa face, mais je n'ai pas pu le faire ; parce qu’Aphrodite n'est pas africaine. Il parait que c'est à cause de son ph. Je lis pour être choqué. Si j'avais voulu être confortable dans la vie j'aurais été un dogue ; celui de Mevs pour être plus précis. Mais Dieu merci je ne le suis pas ou pas encore ; ce n'est qu'une question de temps avant que le dollar ne me chasse parmi les humains en me remettant à quatre pattes dans la cour du Msye. Je lis aussi pour vous. Car vous aussi vous aimez être choqué. Vous êtes le choc incarné, une rebelle. Celle qui n'a pas peur des mots peu importe leur sens puisqu'ils n'en ont jamais ; tout comme les hommes n’ont jamais de maitresse et que les maitresses n’ont jamais le sida.

Et enfin je lis pour ne plus avoir à le faire. Pour éviter de me taper les mêmes personnages, les mêmes concepts, les mêmes formules. Je lis pour ne plus avoir à me farcir les mêmes dialogues entre un cul et une chemise, un pan et un réverbère. Car, au fond, ce qui compte dans la lecture ce n'est pas ce qu'on lit mais ce qu'on ne lit plus. Tous les livres, les histoires, les intrigues que nous aimons nous ne les lisons plus mais, de préférence, les vivons ; même si c'est toujours et encore pour ne plus avoir à le faire.

 

Yàn Davidson Bien Aimé

@moijelis

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